jeudi 27 mars 2014

La Mystérieuse Mme Je : Je veux être aveugle.

                Et moi qui me disais, il y a plusieurs années, que ça passerait, car j’étais forte, j’étais jeune et la vie me souriait…
Tout ça était faux. De faux espoirs, une tendance à la paresse et une âme tourmentée sont les causes de ma maladie. « Mais arrête de penser comme ça, c’est déprimant! Come on, cheer up! » Vous allez dire à un cancéreux « Allez, ne soit pas découragé, si tu veux, tu peux! Alors, guéris et c’est tout! » Non, ce n’est pas aussi simple que cela. Peut-être êtes-vous chanceux, vous et votre tête en bon ordre, votre tendre innocence vous sauvant des cruautés fastidieuses de ce monde.

Je ne suis pas aveugle et, après autant d’années de douleur et de vérités, j’aimerais être aveuglée par de doux mensonges. Je ne veux plus voir la vérité en face. Je ne veux plus être intelligente et deviner que cette mascarade tenue par le monde entier n’est que pour asservir; je veux être asservie et tout oublier. Oublier les first world problems, oublier qu’on essaie toujours de nous asservir pour qu’on puisse servir; pas notre cause, la leur. Et si seulement je pouvais tout recommencer et décider de fermer les yeux, de fermer mon cœur aux autres et de simplement vivre dans ce monde égocentrique, devenir plastique, ne faire un avec l’utopique… Si seulement je pouvais être conne.

Mais je ne le suis pas. Je suis faible et petite et si abusée de mes propres sentiments, de mon propre corps. Ah, mais pour ça, chère Société, vous avez bien réussi. Vous avez réussi à percer ma carapace sous forme de Monsieur Ménestrel pour me montrer que je dois acheter tous ces produits cosmétiques, je dois m’habiller à la dernière tendance et je dois surtout démontrer mes courbes aux autres, car les Grands Hommes de ce monde auront quelque chose à regarder alors qu’ils fourrent ma vie par tous les sens possibles et me laissent détruite parce que j’ai décidé d’ouvrir les yeux et voir que, finalement, la vie, c’est moche. C’est moche et je ne fais que me faire piler dessus, car j’aime trop. J’aime trop et les gens, eux, n’aiment qu’eux, au fond, car sinon ils ne feraient pas autant de mal autour d’eux, se justifiant par Me, Myself and I. Mais non, je ne suis pas parfaite. Moi aussi je blesse. Moi aussi j’ai mes élans de Me, Myself and I. Je suis humaine après tout et je veux tant être comme tous les autres pour ne plus souffrir. Je ne veux plus voir la vérité, crevez-moi les yeux! Je ne veux plus être témoin de votre perfidie, je veux devenir cette blondasse qui ne sait rien sauf comment appliquer le bon rouge à lèvres assorti à la bonne robe avec la bonne longueur appropriée pour la bonne occasion. Je veux devenir cette femme parfaite à marier, qui aime se faire payer un repas, qui fait des enfants pour faire monter l’économie et acheter des couches jetables parce que, allez, c’est dégoûtant du caca, il faut mettre ça aux poubelles! Et puis la solution pour bébé c’est bien meilleur que du lait maternel. Franchement, des lèvres sur des seins ne devraient être que des maris pervers sur les nichons parfaits de leur femme en plastique!

Je n’en peux plus. J’en deviens folle, hystérique. Et je veux tellement être normale, être asservie que j’accepte ce que les médecins me balancent : diagnostiques un par-dessus les autres réglés par de bonnes capsules pleines de je ne sais pas encore quelle drogue pour me mettre le cerveau sur le neutre et me laisser emporter par la foule. Et oh, cette culpabilité qui vient me chercher d’être inutile à la société, une vaux rien qui est sur l’assurance, qui laisse tous les autres bons travailleurs moutons blancs payer pour ma paresse, que dis-je, ma larve de personne!

Peut-être que ce philosophe que je détestais au CÉGEP avait raison. Peut-être que l’homme, en société, devient un être du mal, car en société, il y a une hiérarchie, ce qui veut dire que quelqu’un vaut plus qu’un autre alors que nous sommes tous fait de chair et d’os. Mais, personnellement, je ne crois pas que l’homme est fondamentalement bon comme lui. Je me considère (ais?) comme une bonne personne et j’ai tout de même des pensées noires, je fais tout de même mal à autrui et, des fois, j’en suis heureuse, comme Satan qui regarde la Vierge succomber aux tentations qu’il lui offre sous forme d’homme aux hormones dans le tapis. Nous ne sommes pas une race bonne. Nous faisons du mal à nos confrères et consœurs, nous détruisons l’environnement pour de l’argent, un bout de papier ou de métal QU’ON lui attribue du pouvoir. Nous tuons sans remords, nous créons des armes de destruction massive comme « protection », mais sans intentions de faire du mal, pourquoi aurions-nous besoin de protection contre nous-mêmes?


Je n’aime pas l’être humain. Je n’aime pas ma race. Je n’aime pas ma vie. Je n’ai pas envie de vivre dans une société aussi corrompue avec des gens qui abdiquent que parce que la majorité le fait. 

1 commentaire:

  1. J'adore ton texte, Madame Je, il est si magnifique et poignant. Je t'entends hurler dans mon coeur ! =')

    Tu écris bien mais je suis aussi d'accord avec toi sur le fond : des fois je me prends à détester l'humanité alors que je me pensais philanthrope. (Travailler dans le commerce ça vous fait changer de regard) En fait je crois que nous sommes une espèce à la fois sincèrement mauvaise ET bonne à la fois. Nous sommes capable du pire comme du meilleur, la plupart des gens sont nuancés entre les deux et font parfois des choses bonnes et parfois des mauvaises. Malheureusement il y a aussi des personnes profondément méchantes, mais d'un coté des anges qui ne sont que bonté. Et puis il y a aussi des gens sans personnalité qui suivent la masse.

    Notre société actuelle est malade, je pense comme toi.

    J'ai essayé d'être normale et je n'ai pas aimé me brider les yeux, okay c'est plus difficile d'ouvrir les yeux et d'essayer de faire le bien, mais je ne veux pas être normale et bête. ^^ Courage Madame Je, tu es plus forte que tu le penses ! ;)

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