vendredi 4 avril 2014

La Mystérieuse Mme Je : You had me at hello.

Une autre. Une autre paie toute dépensée dans des dettes et pas un seul sou pour moi. Bon, je dois l’avouer, je m’étais acheté du DQ et des chips avec l’argent que Mme Mom m’a donné pour m’aider. Et j’ai pu me faire une épicerie plus ou moins décente. Évidemment, j’ai tout mangé ce qu’il y avait dans cette épicerie ou presque, car, on s’entend, après avoir vécu sur des pâtes et du thon et du poulet préusiné panné probablement aussi bon pour la santé que des McCroquettes, on saute sur la nourriture plus tentante qu’on vient d’acheter. Environ 100 $ d’épicerie en deux mois, c’est beaucoup pour une personne? Je ne trouve pas. Ça compte mes boîtes de fruits et légumes pour mes 3 lapins ça… Bon, c’est vrai, avec trois belles petites créatures comme les miennes, on n’est pas seul. Mais on se sent seul dans son petit cœur. Au début, je sortais. J’ai peut-être fait le plein d’essence une fois et demi en deux mois. Et mes parents habitent à une trentaine de minutes en voiture… si c’est moi qui suis au volant. Non, Mme Je n’est pas la plus responsable et calme des conductrices. Même si ça aurait pu me sauver quelques kilomètres en essence, j’ai quand même conduit avec la rage au volant, car je ne suis pas moi-même… Non, je ne suis plus si rongée par la dépression que je l’étais avant. J’ai arrêté toutes mes pilules sauf les nouvelles petites jaunes… que j’ai dû cesser lundi par manque d’argent. Joie. Elles me donnaient de l’énergie et c’est probablement la seule chose qui me gardait de me morfondre. J’avais la présence d’esprit pour me dire « Non, ne penses pas comme ça, tu vas t’en sortir, car tu es bien entourée d’amis et de famille géniaux! » et de jouer à mes jeux vidéos ou écouter les mille et une séries télévisées que je suis. Parce qu’avant ces pilules, c’était assez déprimant…

Mais je dors. Seigneur que je dors! Des fois, je peux dormir une vingtaine d’heures dans une journée. Ma routine de sommeil s’était transformée, pour les deux dernières semaines, à me coucher en matinée et me réveiller en soirée. Je pouvais aisément faire du cinq à cinq. Aisément.

Santé, vous dites? Non, pas du tout. Ça m’a pris un bon deux mois et demi à me remettre de mon infection à la gorge. J’ai pris mes antibiotiques… plus ou moins comme il faut. Comment voulez-vous prendre vos petites pilules magiques quand vous dormez 21 heures d’affilée? Ou bien que vous testez une nouvelle drogue et vous vous retrouvez à perdre des heures à ne faire rien du tout sur Internet en le remarquant qu’après que ces précieuses heures se sont écoulées. Et non, je ne les passe pas accompagnée, ces heures. Je vois mes amis une fois par semaine. Pour tous mes amis. Et, une fois aux deux semaines, je vois mes parents. Avez quelle voiture voulez-vous que je me rende en semi-campagne où l’autobus le plus près est à 14 km et ne passe qu’aux heures de pointe? Alors que M. Dad s’est coupé le bout du doigt? Et que Mme Sœur est SI éprise par son nouvel homme et sa vie d’étudiante et son boulot et son budget serré… et que M. Frère est aussi fauché que vous, la vache! Mais lui, il est réellement mal en point. Ses assurances au boulot ne veulent pas assumer leur responsabilité et le payer alors qu’il s’est fracturé le genou. Comment voulez-vous aller de village en village, en voiture toute la journée, debout, à genoux, accroupis, debout, assis, debout, accroupis, debout, assis, debout? Exactement.

J’étais en train de faire la vaisselle quand j’ai réalisé tout cela. J’ai arrêté de faire la vaisselle et je me suis assise, ahurie. J’ai pensé à Monsieur Jeleveux. Et maintenant, j’ai un serrement au ventre, car je sais que je ne devrais pas rester sur ces pensées et me concentrer sur autre chose, comme la vaisselle tient! Je l’avais commencée parce que je commençais une série de pensées qui ne me seraient pas du tout bénéfiques si j’y pensais trop.

« Pense-t-il à moi des fois? »

Non. Je ne dois pas écouter de Mme Aguilera qui parle de ses relations passées et surtout pas roses. Le serrement d’estomac me reprend, me rappelle que j’ai faim et me donne une indigestion. Sur une banane. Mes INTESTINS n’arrivent pas à digérer une BANANE. Je n’arrive pas à faire passer des FIBRES. N’est-ce pas ça qui donne une bonne digestion et tout?

« Est-ce qu’il se demande si je vais bien? »

Non. J’ai vraiment mal au ventre là. Pourquoi ai-je eu la brillante idée de passer par les panneaux rouge néon arc-en-ciel qui me disaient de faire demi-tour, que c’était stupide et que j’allais me faire du mal? Je le savais très bien et je devrais assumer. Mais assumer de la douleur quand on est si, si près de sauter dans le gouffre une fois pour toutes et y rester…
Mes amis sont géniaux, vous savez. Ils endurent mes humeurs changeantes comme un battement de cils, mes angoissent perpétuelles et, surtout, mon manque d’argent. S’ils veulent me voir, ils doivent se déplacer. Mais ils aimeraient, comme tout bon jeune adulte, aller au restaurant, eux aussi. En bonne compagnie. Parce qu’ils pensent que je suis de la bonne compagnie. En tout cas, je crois. Je pourrais me tromper, mais j’ai fait en sorte de supprimer toute mauvaise personne à ma vie, toute personne qui pourrait amener négativité et angoisses de ma vie… En fait oui, bon, vous m’avez bien eue. Je les ai supprimés de ma liste d’amis Facebook.

« Pourquoi ne me dit-il pas allô? »

You had me at hello. Et voilà. J’y réponds moi-même à mes questions et ça me calme. J’ai mal au ventre, mais mon cerveau est là. Les larmes montent, ça fait mal, mais je sais que c’est un mal pour un bien. TU lui as dit d’arrêter de TE parler. Donc il fait tout simplement ce que TU lui as dit de faire. OUI, TU AIMERAIS QU’IL TE LAISSE TRANQUILLE, MAIS QUE, UNE FOIS, UNE SEULE ET UNIQUE FOIS, IL TE DISE « HELLO ». Because you’ d have me at hello. Une larme roule sur ma joue alors que je ferme les yeux. Ce n’est pas de l’amour, contrairement au film… mais de la reconnaissance… Je n’ai pas le mot, mais je lui sauterais dans les bras en pleurant. Pas de joie, en fait un peu… de soulagement… Moi, je n’ai pas les mots pour dire les sentiments qui feraient vibrer mon esprit s’il me démontrait un tout petit peu d’inquiétude…

Quelqu’un a fait ça pour moi. Monsieur Prince. Et je ne lui ai même pas été reconnaissante. Je suis une harpie. Non, je ne me traite pas ainsi pour me faire du mal, mais pour essayer de me réveiller, de me secouer, de m’ouvrir les yeux sur la triste réalité : je ne ressens plus de sympathie. Je ne ressens même plus d’empathie. Mes amis viennent me voir avec leurs peines et leurs craintes et je les aide tant que je peux… mais mon humeur est si vite à devenir envenimée que je suis rapide à terminer la conversation ou arrêter de répondre ou être tout simplement méchante. Et je m’excuse pour cela, Monsieur Flame. J’espère un jour avoir le courage de venir te le dire, vraiment. De m’excuser pour vrai. Que tu le saches que j’ai vraiment été une sale harpie avec toi et que j’en suis désolée. Je n’ai pas d’excuse pour avoir été aussi méchante avec toi, douleur ou pas. Je blâme tout ça sur le temps. Ça fait 8 ans que j’ai mal, bla, bla, bla. Oui, ça fait longtemps que ma tête souffre, que je ne sois pas bien dans ma peau et que j’essaie, que j’essaie si fort de devenir forte et de pouvoir aider ceux que j’aime et que je peux me supporter moi-même. Eh bien, sans le remarquer, je suis devenue plus forte. Je subviens (presque) à mes besoins seule dans mon propre chez moi avec mes propres animaux de compagnie et mes propres factures à MON nom.

Finalement, je souris. Je souris, car j’ai réalisé à quel point j’ai avancé. Que oui, j’ai encore beaucoup de chemin à faire avec la gestion de mes émotions, les prises de drogues pour stabiliser mon humeur, mes rendez-vous chez les thérapeutes et les médecins et les psychiatres, mon calme intérieur, mes relations interpersonnelles… Je ne vois peut-être pas la lumière, encore, je suis encore dans le noir et mon cœur me fait mal tous les jours; même s’il est en mille miettes depuis belle lurette, on dirait qu’il se brise encore. Comme s’il se réparait durant la nuit et se brisait à mon réveil et continuait de s’émietter toutes les petites minutes qui passent…
J’ai souvent cru qu’il ne restait rien à briser, mais chaque fois je me rends compte que j’ai le cœur gros comme ça et qu’il en faut beaucoup pour en venir à bout, que ce soit côté émotif, santé physique ou mentale, bravant la société que je déteste – anarchique que je suis — ou tout simplement tenir face aux méchancetés qu’on me lance et voir si elles ne viennent pas de moi, même. Bien sûr, j’aimerais les braver avec quelqu’un juste à côté de moi, mais Mme Mom, Monsieur Dad, Monsieur Flamme, Mme Sœur, Monsieur Frère, Monsieur Inquiet, Monsieur PervyMcPerv, Monsieur Philsburry, Mme Neurotic et tous les autres qui me supportent et me sont si chers ne sont pas loin derrière.


Me manque à savoir si Monsieur Jeleveux viendra nous rejoindre ou continuer de faire de l’air….