Lorsque quelqu’un souhaite notre mort, c’est très
douloureux. Je suis chanceuse que mon esprit soit si engourdi que je ne ressens
pas cette affreuse douleur qui s’accapare de mon âme. Depuis que je suis sortie
de l’hôpital, je n’arrive pas à ressentir les émotions de façon adéquate, je
suis plutôt froide, mais au moins cela me sauve d’une effroyable douleur qui
pourrait me détruire au point de non-retour. Tous les jours, je souhaite ne
jamais m’être rendue à l’hôpital, mais on m’y a amenée. Il est trop tard pour
changer quoi que ce soit, donc on doit avancer malgré toutes les atrocités de
la vie.
Seule émotion que je ressens considérablement est
la colère. Lorsque je communique avec quelqu’un de façon virtuelle – par
message texte ou sur les réseaux sociaux —, je suis calme et posée. J’arrive à
endurer tout ce qu’on me lance par la tête. Toutefois, lorsque je suis face à
face, je n’arrive pas à garder mon sang-froid. J’explose. Je n’ai pas le temps
de me reposer. J’imagine que c’est aussi parce que je vois les émotions des
autres dans leurs yeux, dans leur langage corporel et ça fait mal. J’ai donc
explosé aujourd’hui. Je ne crois pas que je suis une mauvaise personne, mais ma
colère était si grande que j’ai dit des paroles cruelles que je regrette. Je me
suis fait détruire l’âme, donc j’ai décidé de détruire ce qui m’a fait du mal.
Point de non-retour. La douleur est trop grande même si je ne la ressens pas
tout à fait, je sais qu’elle est là. Je sais qu’elle s’est insinuée dans le
trou béant qu’est mon cœur.
Tout allait bien. J’avais réussi à faire sourire
aujourd’hui. J’avais réussi à plus ou moins retenir mes larmes, à paraître
forte pour inspirer confiance et courage. En soirée, par contre, tout a
chamboulé alors qu’on me rejetait et qu’on m’accusait d’être une menteuse.
Habituellement, je ne mens pas. Presque jamais. J’ai menti pendant un bon
moment, car j’étais honteuse. Je me suis éloignée pour essayer de ne pas
mentir, pour ne pas mettre le fardeau de ma douleur sur les épaules des autres.
Nous avons tous nos problèmes et plusieurs ont besoin d’aide, ils n'ont pas
besoin de malheur de plus dans leurs vies.
On m’a traitée de toutes sortes de noms, mais
depuis que j’ai avoué tous les mensonges que j’ai crachés pendant trop
longtemps, je n’ai pas menti… autre que lorsqu’on me l’a demandé. Ce sont des
mensonges innocents qui ont aidé à sauver de situations embarrassantes.
Personne n’aime les problèmes d’argent et je comprends ce stress, donc je
voulais aider. Je crois que je mérite certaines des méchancetés qu’on m’a
offertes. J’ai été sans cœur, donc je méritais quelques insultes en retour.
C’est donnant-donnant. Bien sûr, ce n’est pas une bonne façon de vivre; se
venger ou défouler sa colère sur les autres ne fait qu’amener de la douleur et
du regret à tous. J’apprends de mes erreurs et je vais pratiquer ma patience
avant de me lancer dans quoi que ce soit. Je dois améliorer ma santé mentale
avant de pouvoir essayer d’avoir des connexions trop personnelles, trop
sérieuses. Je dois être forte…
Je ne sais pas
si je suis forte en ne ressentant aucune émotion. Je ne crois pas que c’est du
courage; je crois que je refoule et qu’un jour je vais exploser. Pour
l’instant, je préfère refouler, car je ne crois pas que je peux endurer toute
cette douleur, cette culpabilité, cette honte. Je préférais de loin de la
douleur physique à ce cœur en miettes. Je ne vais toutefois pas chercher le
trouble; cela serait trahir des personnes qui me sont chères. Je ne veux pas
qu’on s’inquiète pour moi; j’essaie d’être forte pour qu’ils soient fiers de
moi et peut-être pourrais-je aider un tout petit peu ceux qui en ont besoin en
essayant d’être forte. Mon but ultime dans la vie est de faire une différence
dans celle des autres, je veux à tout prix aider et semer la paix et la bonté,
car ce monde est trop cruel pour trop de gens.